Kandas,
Toi qui enseignes le droit, toi qui fais la leçon aux étudiants avec l’air sérieux du Professeur qui connaît la vérité des textes, j’allais t’oublier dans ma déperdition. Toi, mon ami, mon beau qui admirait tellement le président CDD, j’ai besoin que tu m’expliques une énigme de la nouvelle Constitution.
À l’article 154, on me dit : « Le pouvoir judiciaire est indépendant. »
Très bien, ça sonne bien. Mais juste après :
Article 155 : c’est le Président qui nomme les magistrats.
Article 158 : le Conseil supérieur de la magistrature est sous son autorité.
Article 159 : et, bouquet final, le Président est lui-même le garant de l’indépendance de la justice.
Alors, Kandas, toi qui parles la langue du droit, dis-moi :
Est-ce que l’indépendance, c’est quand le loup choisit lui-même les chiens de garde du troupeau ?
Est-ce que l’impartialité, c’est quand le berger signe un contrat de surveillance avec le renard ?
Est-ce que la liberté, c’est quand on proclame l’autonomie d’un mouton attaché à la laisse ?
Moi, profane, j’appelle ça un conte cruel :
Le loup jure qu’il sera le protecteur officiel des moutons.
Le loup nomme les moutons qui doivent le surveiller.
Et si un mouton ose bêler trop fort, le loup rappelle gentiment que c’est lui, le garant de leur indépendance.
Kandas, aide-moi à comprendre : est-ce du droit, ou un manuel de dressage pour moutons naïfs ? Parce que si c’est ça l’indépendance de la justice, alors moi je suis déjà Prix Nobel de mathématiques.
Je t’interpelle avec toute l’amitié qui nous lie : est-ce que tu veux vraiment expliquer à tes étudiants que la justice est indépendante… parce que c’est le loup qui en garantit la liberté ?
Avec toute mon amitié corrosive,
Alpha Issagha Diallo
Profane sans code ni chaire, mais assez lucide pour savoir qu’un mouton nommé par le loup ne sera jamais libre.
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